Deux lecteurs de cantons différents ont eu la même mauvaise surprise de leur compagnie d’électricité. Le courant qu’ils ont injecté depuis leurs installations photovoltaïques n’a pas été entièrement décompté, ce qui leur a valu des pertes financières.
Une lectrice de La Côte fait poser une installation photovoltaïque à l’automne 2023. Celle-ci se met à fonctionner juste avant Noël, le 20 décembre. Dès cette date, du courant électrique est injecté dans le réseau de Romande Energie, son fournisseur. Or, ce n’est que le 2 avril que ce dernier commence à tenir compte de l’énergie produite dans l’établissement de ses décomptes.
Un lecteur fribourgeois a eu une expérience similaire avec Groupe E. Au moment de recevoir son décompte annuel, début mars dernier, il découvre que son fournisseur lui a décompté une injection dans le réseau moindre que celle que lui indiquait le compteur de l’onduleur (l’appareil qui convertit le courant continu généré par les panneaux solaires en courant alternatif destiné à la consommation) de son installation photovoltaïque.
Installation pas validée
Pour la lectrice vaudoise, l’explication du délai réside dans l’identification d’un problème technique à son installation quelques jours après sa mise en marche. Mi-janvier 2024, moins d’un mois après la mise en marche de son installation photovoltaïque, un contrôle a établi que l’un des circuits de son installation ne fonctionnait pas correctement.
Elle a dû attendre mars pour que la réparation puisse être menée à bien, puis le 2 avril pour qu’elle soit validée en tant que telle à la suite du contrôle technique IAT (installation d’appareils techniques, selon l’Ordonnance sur la sécurité d’installation d’appareils techniques, OSIT). C’est à compter de cette date que Romande Energie a accepté de rémunérer le courant.
Notre lectrice s’étonne que l’électricien vaudois ait accepté du courant émanant d’une installation alors jugée non conforme sans le rémunérer.
Compteur dépassé
L’explication de la mésaventure du lecteur fribourgeois est un peu différente. Précédemment, il pouvait mesurer la quantité de courant injecté dans le réseau à l’aide d’une application fournie par Groupe E. «Quand je faisais des comparaisons entre mon onduleur et leur application, c’était assez semblable», écrit-il à notre rédaction.
Cependant, Groupe E a mis un terme à son application en annonçant l’installation prochaine de compteurs électriques intelligents, c’est-à-dire capables d’établir ces décomptes. Or, ce compteur n’a pas encore été installé chez lui.
Entre-deux, il fait ses comptes: le courant injecté dans le réseau tel que décompté par son onduleur est supérieur de quelque 240 kilowattheures à celui comptabilisé par Groupe E. Vu le tarif de reprise de 14,5 centimes le kilowattheure, la différence n’atteint pas 40 fr. pour une année. Néanmoins, notre lecteur s’étonne de cette différence à son détriment alors que le compteur mesure plus précisément la part de courant qui est autoconsommée.
«A bien plaire»
Interpellées séparément par notre rédaction, les deux entreprises d’électricité invoquent des réponses similaires. Pour Romande Energie, le courant injecté dans le réseau «refoulé» (pour reprendre son expression) par une installation non conforme «n’est pas pris en compte». Si cette installation n’est pas équipée d’un compteur capable de décompter la consommation de courant et l’injection, «elle n’est pas rétribuée».
Or, l’installation de notre lectrice est équipée d’un tel compteur, si bien que le courant injecté a pu être précisément décompté: plus de 900 kilowattheures en à peu près trois mois. Au tarif de reprise de 17,6 centimes le kilowattheure, cela représente près de 160 fr. Dans ce cas, l’électricien peut accepter, «à bien plaire», de rémunérer le courant. Ce qu’il a fait, du reste, dans le cas de notre lectrice. Mais pour arriver à ce résultat, cette dernière a dû fermement protester.
Groupe E invoque aussi, pour sa part, un problème de compteur. Sauf qu’il n’a pas encore remplacé les appareils traditionnels – qui ne comptent que la consommation de courant – par de nouveaux appareils capables de décompter aussi la production et l’injection dans le réseau. Il dit s’engager à combler cette lacune en équipement d’ici la fin de cette année, «éventuellement début 2025».
Notre lecteur affirme s’être vu annoncer un délai plus long, d’ici 2027. D’ici là, Groupe E aurait pu conserver la fonctionnalité de son application, évitant les contestations.