Une famille romande a eu une désagréable surprise au moment de découvrir la facture de son notaire. Le montant était nettement plus élevé que ce qu’il aurait dû être. Le notaire, qui exerce aussi la profession d’avocat, a appliqué le tarif de ces derniers plutôt que celui des premiers.
Le 9 janvier dernier, la famille reçoit de son notaire une note d’honoraires de 4094,65 fr. toutes taxes comprises. Ces honoraires recouvrent plusieurs actes: la radiation d’un droit d’usufruit, la constitution d’un droit d’habitation non instrumenté, un mandat pour cause d’inaptitude et des conseils. Autant de demandes faites par la famille et effectuées en 2023.
Un courriel à 33,33 fr.
Ce sont les détails de la facture qui ont éveillé les soupçons de la famille: l’heure de travail était facturée 400 fr., le tarif des avocats. Suivant cette logique, le notaire avait notamment facturé 33,33 fr. un appel téléphonique de cinq minutes, puis encore 33,33 fr. une transmission de courriel lui ayant pris cinq minutes; elle avait compté 10 minutes – soit 66,67 fr. – pour l’envoi d’un courriel destiné à fixer un rendez-vous.
Or, «le tarif des honoraires indique clairement un montant de CHF 250 fr. l’heure. Tous les notaires doivent s’y conformer», écrit François Uldry, président de la Chambre des notaires de son canton, sur demande de notre rédaction.
A la réception de la facture, les quatre membres de la famille ont envoyé un courrier de protestation à leur notaire. Dans ce courrier, ils écrivaient: «Nous sommes extrêmement choqués du fait que tous les courriels, téléphones ainsi que la lettre de facturation, et la clôture du dossier soient facturés à un montant de Fr. 400.–/horaire!! (auquel est rajouté la TVA).»
Puis, en s’appuyant sur le Tarif des notaires de son canton relatif aux honoraires dus pour les activités annexes, elle a demandé de «reconsidérer, sans frais supplémentaires, le tarif de certains honoraires facturés, comme notamment à titre d’exemple le téléphone facturé Fr. 33,33!».
Suite à cette protestation, le notaire a envoyé une seconde note d’honoraires le 9 février. Son montant: 3367,50 fr. Soit: 17,7% de moins que le montant de la première facture.
Le tarif horaire était ramené à 250 fr., conformément au tarif des notaires. Par conséquent, les appels téléphoniques et courriels qui prenaient cinq à dix minutes ont vu leurs prix être abaissés à 20,83 fr. et 41,67 fr. respectivement. Quelques jours plus tard, la famille a payé la facture.
Remontrance de la Chambre
Interrogé par notre rédaction, le notaire a rétorqué qu’il devait en demander la levée du secret professionnel auprès de la Chambre des notaires de son canton. Celle-ci s’est même montrée disposée à traiter cette affaire rapidement lorsqu’elle a été interrogée par notre rédaction. Mais le notaire concerné n’a pas entrepris de démarche dans ce sens. Lorsque la facture a été payée, il a même affirmé à notre rédaction que l’affaire «ne fait plus l’objet de litige».
La famille reste cependant remontée contre son notaire et a confirmé à notre rédaction son accord à la publication de son témoignage. Mais elle a renoncé à saisir la Commission du notariat – l’instance disciplinaire – pour limiter ses frais.
Faute de contestation formelle, la Chambre des notaires ne s’est donc pas prononcée. Elle n’a pas adressé de reproche au notaire concerné. En revanche, elle «rappellera {au notaire concerné} son obligation de respecter le tarif en vigueur».
Vérifiez vos factures
Les tarifs des notaires sont consignés dans des textes légaux, qui diffèrent d’un canton à l’autre, mais auxquels il n’est pas possible de déroger. Des tarifs différents sont applicables selon la nature du travail du notaire. Vérifiez, par conséquent, que la facture qui vous est adressée correspond bien au tarif en vigueur.
Pourquoi pas de divulgation du nom
Dans plusieurs cantons, dont Fribourg, le notaire est un officier public. Ses actes sont officiels et il porte la responsabilité de leur exactitude. Mais il n’est pas un personnage public, au sens où sa notoriété – à quelques exceptions près – ne dépasse pas le cercle de ses clients et de sa région. Après consultation de plusieurs juristes internes et externes, la rédaction a par conséquent renoncé à publier le nom du notaire concerné.